jeudi 31 mai 2012

A ne voir que la folie, il n'y aura plus d'absurdes.

Bonheur, plaisir, confiance, bien-être, plénitude. Être heureux. C'est un sentiment complexe, fait de nombreuses sensations moins enfouies, bien plus décelables dans leurs manifestations. Nous avons tous été heureux à un moment, m^me si notre mémoire, elle, peut faire défaut. Que cela soit durant notre enfance, notre "vie active", ou plus tôt, nous pouvons nous enorgueillir de cet instant, un temps si particulier.

Le malheur peut alors être d'avoir vécu ceux-ci il y a trop longtemps, ou bien lors de périodes trop pleines d'à-côté pour que cette mémoire puisse les stocker. Ou être une de ces personnes qui ne veulent se rappeler, de par les douleurs nées des comparaisons, de la création sans cesse renouvelée de la peine. Mon avis est que cette blessure est saine et nécessaire afin de se créer les vrais tremplins de notre vie.

J'ai tendance à croire que je suis un monolithe et que le moindre imprévu me bloque et me stoppe radicalement. En réalité, je bénéficie d'une force d'inertie implacable me faisant (pan !) impitoyablement avancer quoiqu'il arrive. Je fais du surplace certes, mais embarqué sur un tapis roulant. Et grâce à cela, j'ai pu profiter d'expériences inattendues. Sans jamais forcer ma chance. Le devrais-je ? J'ai été pourtant heureux à de nombreuses occasions...
Un noël avec mon frère et sa femme, un feu de cheminée me berçant lentement.
Sur la route de Munich, follement parti, jamais arrivé, grâce et surtout avec Jessa.
Quand Marianne m'a dit "Je t'aime".
En traversant le Passage du Gois avec Aline et Marianne.
Sous le baiser de Elodie.
Lors de mon effondrement, rattrapé et enveloppé de justesse par Caro, absolue remontée et repreneuse en main de ma vie.
Quand une personne que je ne connaissais alors pas m'a emmené voir American Gangster. Puis Sweeney Todd. Puis Into the Wild. Puis...
Les cimetières du Mont Royal.
Son sourire à Brest...
Ses envies à Bruxelles...

Je veux sourire.

vendredi 18 mai 2012

Tracé

Adolescent m'en témoigne, la route n'a pas de fins, à peine des bifurcations ;
Les choix ardus en restent, qu'importent les outrances, de nouveaux choix s'ouvrent.

Adulte m'en témoigne, l'infinité est un arrêt volontaire :
Monter ou descendre, rien n'est absolu, et rester n'est pas choix.

Neige si blanche m'en voudras-tu ? Je ne m'étouffe de toi.
Neige si blanche m'ôteras-tu ? J'attendais tes choix.

Figure étroite et chemin hurlant, au bout de ta route :
Prends le temps mais choisis vite.

Que la peine est sanglante quand elle souhaite pardonner, mais qu'elle est douce à nous tuer.

Bagne

Il parait que je ne suis pas égoïste. J’admets. C’est pourtant une qualité que je vante pour se prémunir de la souffrance. Peut-on réellement faire croire à qui que ce soit qu’il est possible de ne pas souffrir ? C’est une chimère. La vie est souffrance, la mort est repos. Ce constat établi, il faut alors faire un choix. Adolescent je croyais que la liberté du choix n’existait pas, pour la bonne raison que ma route était tracée par d’autres, et que y échapper faisait parti du chemin naturel que tout le monde se doit te tester. Adulte j’ai compris que ne pas choisir faisait aussi parti des options. Ne pas savoir quoi faire nous pousse à nous arrêter, ce qui est une action en soi. Je ne sais pas.

Malheureusement, quoi que proposera la route, il n’y aura aucune possibilité de reculer, du moins pas collectivement. Et ce sont nos interactions aux autres qui nous forcent à faire tel ou tel choix. Aux autres…

Je concevais jusqu’à il n’y a pas si longtemps que les autres étaient les gens que je ne définissais pas comme ma vie. Ce n’est pas de l’égoïsme mais de l’égocentrisme, et à ce jeu, il n’y a aucun doute, je suis un champion. Et un aveugle. C’est la deuxième fois qu’une relation compte vraiment pour moi. Et c’est la deuxième fois qu’elle se termine de cette manière. J’y ai consacré du temps, de l’énergie, beaucoup de ma santé aussi. Des ambitions, des projets, des idées sont aussi passées à la trappe. Je ne le regrette pas : ce furent des choix complètement assumés. C’est là que je mesure le chemin qui me reste sur la route de l’égoïsme. Je fais des sacrifices car le bonheur de l’autre contribue plus à mon bonheur que la réalisation de mes rêves. Mon rêve devient alors de vivre avec cet autre.

J’ai menti plus haut, enfin pas totalement. Il est vrai que c’est la deuxième fois qu’une relation amoureuse compte. De cette vie j’en retiendrai cependant deux autres. Même si la dernière ne le sait pas, ses paroles comptent parce qu’elle m’indique le cap.

J’ai longtemps cru que j’aurai un choix à faire à la fin de notre couple. Je me trompais lourdement : cette fin n’est pas un choix, celui-ci intervient juste après, transformant alors le passé en un fait établi, insurmontable. A force d’inclure le bonheur des autres dans mes pré-requis, j’ai simplement réussi à rendre nos relations trop ardues à assumer. Le plus beau piège de cette mascarade est l’aveuglement complet qui s’opère alors.

(en photo, le Fort Liédot sur l'Île d'Aix)