mardi 3 novembre 2009

Chronologie autour d'un cobra 1


L'écrivain était assis dans les rues de la ville, un bloc-note calé contre son avant bras gauche. Il se demande ce qu'il va faire maintenant qu'il est ici, au milieu de la cité. En face de lui, les feux s'allument et s'éteignent au rythme des voitures qui tournent sans relâche. Depuis le moment où il s'était installé sur le box à journaux de la station de métro, il avait déjà dû en voir défiler des milliers, et pourtant, le soleil n'avait parcouru qu'un seul écartement d'immeuble. Il tourne la tête, cherche à s'orienter par rapport à l'astre puis fixe un point, occupé vaillamment par un écran géant qui faisait la promotion d'un soda bien connu, mais ce n'était pas ce qu'il voyait : par ici, dans les rues de cette direction, il y a son amour. Le temps s'arrête pour lui, le temps qu'un enfant sorte du fast-food adjacent en courant et percute le box, déjà vide, et déséquilibre l'aventurier. Il revient alors à la réalité et ressent toutes les pulsations urbaines : les klaxons d'une place mondiale, les sirènes d'un quelconque fourgon d'autorités, les discussions des adultes, les rires et cris des plus jeunes, les vibrations du métro qui passe juste en dessous, à quelques mètres tout au plus. L'aventurier se souvient, il sort alors un crayon...
"La vie est simple si on la laisse couler. Si on ne prend pas de décisions et que l'on se réserve le droit de prendre le premier chemin venu, pour l'unique raison que c'est le premier. J'ai pris une décision, la vie n'est plus simple, mais elle m'enivre pour cette raison qu'elle nous impose la réflexion continuelle. Pourtant, ce choix là n'était pas le mien en premier lieu. Il le devient si je l'accepte et y prend parti. La plupart des gens se voit imposer les décisions des autres, et encore, les décisions prises ne sont pour la plupart du temps que des automatismes : vais-je prendre ce tram ou le prochain ? La question peut sembler stupide mais elle change pourtant ma vie du tout au tout. Dans celui là, il y a un ami d'un ami, qui pourrait me reconnaitre, avec lequel je vais discuter, qui va me présenter son colocataire avec qui il voyage, puis m'inviter chez lui et me présenter le troisième luron de l'appartement, une luronne plutôt, avec laquelle je vais partager un morceau de ma vie. Dans le prochain je ne vais pas trouver de place assise et terminer ce livre que j'avais acheté juste pour bien présenter lors d'un dîner, et m'apercevoir que le sourire n'est pas si anodin. Nous prenons le premier pour la simple raison que c'est le premier, mais si nous avions su les implications de ce choix, l'aurions-nous pris ? Nos décisions sont la plupart du temps des automatismes, et nous sommes pour le plus souvent contraint aux décisions des autres."
L'écrivain range son crayon, méthodiquement, comme toujours l'ouverture gauche du sac en premier, puis à droite, enfin, plonger sa main pour sentir le briquet qu'il garde toujours -il faut toujours se souvenir du passé pour reproduire les mêmes erreurs et mieux appréhender nos choix. Après l'avoir fermé, il cale son bras contre sa poitrine afin de maintenir le carnet à porté, il serait bête de louper le moindre évènement intrigant et de ne pas se souvenir des détails par la suite. Puis il se tourne, et file droit sur Hyde Park le long de Piccadilly...

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